© Instagram John Allen Chau

Un jeune missionnaire américain tué par les flèches d’une tribu coupée du monde

Le Vif

John Allen Chau, 27 ans, a péri vendredi sous les flèches des chasseurs-cueilleurs de l’île indienne North Sentinel. Il tentait d’approcher illégalement cette communauté hostile au monde moderne, probablement dans un but religieux. Les autorités sont aujourd’hui confrontées au casse-tête du rapatriement du corps, qui pourrait occasionner la contamination de cette tribu non-immunisée contre les maladies modernes.

Le peuple de chasseurs-cueilleurs des Sentinelles, qui compterait 150 âmes, s’attaque à quiconque pose le pied sur sa petite île de la mer d’Andaman. Le 16 novembre dernier, John Allen Chau a été tué à peine arrivé sur l’île de North Sentinel. Il avait payé des pêcheurs pour le transporter jusqu’à ce lieu, situé à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de la ville de Port Blair, mais il avait fini le trajet seul en kayak. L’intrus a reçu une volée de flèches à peine débarqué, a déclaré à l’AFP une source policière ayant requis l’anonymat. « Les pêcheurs ont vu les habitants de l’île lui nouer une corde autour du cou et traîner son corps ».

Conscient du danger

Le journal intime que la victime a tenu dans les jours et heures précédant sa mort, cité ou reproduit par plusieurs journaux, brosse le portrait d’un voyageur qui se voyait comme un missionnaire chrétien conscient du danger de son entreprise. « Vous pensez peut-être que je suis fou de faire tout ça mais je pense que ça vaut la peine d’apporter Jésus à ces gens », a écrit John Chau à sa famille, dans une ultime lettre rédigée le matin de sa mort.

La veille, il avait approché à deux reprises les Sentinelles, parvenant même à leur donner des cadeaux. Mais un enfant lui décoche une flèche qui se coince dans sa Bible. Il prend alors la fuite à la nage jusqu’au bateau de pêcheurs. « JE NE VEUX PAS MOURIR ! (…) Je pourrais rentrer aux États-Unis car rester ici semble signifier une mort certaine », note-t-il dans son journal. Le lendemain, ses dernières lignes datées de 06h20 du matin, indiquent : « J’y retourne (sur l’île). Je vais prier pour que tout se passe bien ».

Sur ce cliché emblématique pris par les garde-côtes indiens après le tsunami de 2004, on voit un Sentinelle essayant d'abattre leur hélicoptère à l'aide d'un arc et de flèches.
Sur ce cliché emblématique pris par les garde-côtes indiens après le tsunami de 2004, on voit un Sentinelle essayant d’abattre leur hélicoptère à l’aide d’un arc et de flèches.© Flickr

Craintes de contamination

Sept pêcheurs ont été arrêtés en lien avec cette affaire. La police indienne a ouvert une enquête pour meurtre, mais se retrouve aujourd’hui confrontée au casse-tête du rapatriement du corps. En raison de leur isolement ancestral du reste de l’humanité, « il n’est pas impossible que les Sentinelles viennent d’être contaminées par des agents infectieux mortels contre lesquels ils n’ont pas d’immunité, avec le potentiel d’éradiquer toute la tribu », s’est alarmée l’ONG de protection des tribus autochtones Survival International. Elle dénonce « une tragédie qui n’aurait jamais dû se produire ». Les forces de l’ordre ont dépêché jeudi un hélicoptère et un bateau pour essayer de déterminer de loin l’endroit où Chau a trouvé la mort. Les responsables locaux ont fait appel à des anthropologues indiens et des spécialistes des tribus et de la forêt pour décider de la marche à suivre.

Le gouvernement indien a tenté plusieurs expéditions pendant les années 1970 et 1980 pour entrer contact avec les Sentinelles. Après une succession d’échecs, l’Inde y a officiellement renoncé dans les années 1990. En 2006, deux pêcheurs indiens dont le bateau avait dérivé pendant leur sommeil jusqu’au rivage de North Sentinel avaient été tués.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire