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Les « shutdowns » à répétition mettent Trump dos au mur

Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste Web

Bras de fer entre démocrates et républicains sur fond de budget fédéral et de financement du mur frontalier, les États-Unis ont connu un 3e blocage des administrations durant l’année 2018. Cet énième shutdown inaugure une seconde partie de mandat difficile pour Donald Trump.

À l’instar de la Belgique qui a vu son gouvernement imploser à quelques mois des élections, les États-Unis sont en phase de blocage administratif et politique. S’il ne s’agit pas de la première fois qu’une telle situation se présente dans le pays de l’Oncle Sam – depuis 1976 et son instauration, les États-Unis ont connu 17 shutdowns – l’administration Trump détient toutefois le record en une année : elle comptabilise un total de trois shutdowns en 2018.

Depuis le 22 décembre 2018, une partie du gouvernement fédéral des USA est paralysée. Les activités de plusieurs administrations ont en effet cessé le samedi à 00H01, après l’échec des tentatives de compromis entre le Congrès et la Maison-Blanche sur le budget et le financement d’un mur à la frontière mexicaine voulu par Donald Trump.

Et pour cause, le président américain réclame que 5 milliards de dollars du budget de fonctionnement du gouvernement soient alloués à la construction d’un mur à la frontière avec le Mexique, l’un de ses principaux engagements de campagne. Ce que refuse catégoriquement l’opposition. Faute d’une majorité au Sénat, les républicains ne disposent pas des 60 voix nécessaires pour l’adoption d’une loi budgétaire. Et ils ne peuvent pas compter sur le soutien des démocrates. En contrepartie, ces derniers proposent plutôt une allocation de 1,3 milliard de dollars pour l’amélioration de la sécurité aux frontières.

Donald Trump se retrouve dos au mur. L’horloge continue de tourner, la fin de son mandat prévu pour 2020 ne lui laisse pas beaucoup de temps pour tenir sa promesse de frontière physique entre le Mexique et les États-Unis, le marqueur central de sa campagne. Et la proposition faite par les démocrates ne satisfait en rien sa demande. Résultat : le désaccord force un blocage des administrations, plus connu sous le nom de « shutdown ».

Qu’est-ce qu’un shutdown ?

Littéralement, cela signifie « fermeture ». Cette procédure est le résultat d’un désaccord entre la Chambre des représentants et le Sénat sur un texte commun entérinant le budget provisoire. En conséquence, le gouvernement se retrouve dans l’incapacité de payer ses fonctionnaires. Les agents administratifs sont alors mis au chômage technique et les agences fédérales sont quant à elles paralysées.

À chaque shutdown, c’est le gouvernement qui décide quelles agences vont fermer. Si aucun service n’est à l’abri d’une telle procédure, jusqu’à présent, les gouvernements ont toujours veillé à protéger des services comme la défense, la sécurité, la santé ou encore les transports aériens.

Mais cette fois-ci, le personnel civil, jugé « non essentiel », a été particulièrement visé par l’administration Trump. Huit cent mille fonctionnaires fédéraux sont affectés au sein des ministères de l’Intérieur, de la Justice, de l’Agriculture et du Commerce, ainsi que dans plusieurs agences fédérales. Parmi eux, près de 420 000 fonctionnaires doivent continuer de travailler pour assurer un service minimum, sans recevoir leur salaire dans l’immédiat.

Pas le premier de l’année

Le premier shutdown de l’année 2018 a débuté le samedi 20 janvier suite au refus des républicains d’aborder la question de l’immigration lors des discussions sur le budget. Les sénateurs démocrates ont en effet demandé d’inclure dans le budget la question du financement du Deferred Action for Childhood Arrivals (DACA) (ndlr : « Action différée pour les arrivées d’enfance »). Ce programme, instauré par Barack Obama, a permis à 690 000 jeunes sans-papiers de travailler et d’étudier en toute légalité aux États-Unis. Les républicains ont affirmé que la date limite pour le DACA et l’immigration était fixée à la mi-mars. Le vote sur ce budget est finalement passé sans contrepartie et le gouvernement a rouvert ses portes le 23 janvier.

En février 2018, le Sénat a débattu d’un projet de loi – la loi de finances bipartites de 2018 – qui prévoyait des crédits de deux ans pour les militaires et un relèvement du plafond de la dette. L’un des sénateurs, Rand Paul, s’est fortement opposé au financement de l’adoption de cette nouvelle loi, qui aurait coûté un billion de dollars. Le Sénat a donc suspendu ses travaux et ordonné la fermeture des opérations non essentielles du gouvernement. Quelques heures après le shutdown, la Chambre a adopté le projet malgré l’opposition du sénateur Rand Paul. Le 9 février, Donald Trump a signé le projet de loi, mettant ainsi fin au deuxième shutdown de l’année.

Le nouveau Congrès fait sa rentrée

Tiraillé entre républicains et démocrates sur fond d’affaire russe et la menace d' »impeachment », le nouveau Congrès américain fait sa rentrée jeudi en augurant une fin de mandat difficile pour Donald Trump.

Comptant un nombre record de femmes et d’élus issus de minorités, le 116e Congrès américain prendra ses fonctions à midi (17h00 GMT): 435 nouveaux élus à la Chambre des représentants, désormais contrôlée par les démocrates, et 100 sénateurs à la chambre haute, qui reste sous contrôle républicain.

En début d’après-midi, la démocrate Nancy Pelosi devrait retrouver, à 78 ans, le perchoir de la Chambre, signant son impressionnant retour au troisième échelon de la politique américaine, derrière le président Trump et le vice-président Mike Pence.

Sauf énorme coup de théâtre, elle sera élue par ses troupes « Speaker », ou présidente de la Chambre, un poste qu’elle avait déjà occupé, marquant alors une première historique, de 2007 à 2010.

Et c’est avec un défi au président républicain qu’elle marquera le premier jour de son nouveau rôle d’opposante en chef: les démocrates ont prévu de présenter dès jeudi à la Chambre des mesures budgétaires temporaires qui permettraient de débloquer les administrations américaines, partiellement paralysées depuis le 22 décembre.

Leur but: s’afficher comme le parti « raisonnable » face à ce qu’ils considèrent comme les « caprices » de Donald Trump.

(Avec AFP)

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