© Reuters

Donald Trump face aux démocrates: main tendue et menaces

Le Vif

Le président américain Donald Trump a assuré mercredi, au lendemain des élections de mi-mandat, qu’il était prêt à travailler avec les démocrates à condition qu’ils renoncent à leurs projets d’enquêtes sur sa présidence et ses finances.

Moins de 24 heures après l’annonce des résultats électoraux, M. Trump a provoqué la stupeur à Washington en annonçant le limogeage de son ministre de la Justice Jeff Sessions, dans le viseur présidentiel depuis plusieurs mois pour s’être récusé dans l’enquête russe.

Cette décision devrait encore accroître les tensions avec les démocrates qui accusent le président de vouloir entraver le cours de la justice sur une éventuelle collusion et son équipe de campagne et la Russie. « C’était un grand jour, un jour incroyable », a déclaré Donald Trump à propos des élections, lors d’une conférence de presse très décousue au cours de laquelle il s’en est pris avec agressivité à plusieurs journalistes.

Les démocrates ont ravi une trentaine de sièges à la Chambre des représentants où ils seront désormais majoritaires. Au Sénat, les républicains ont légèrement accru leur majorité, qui devrait passer de 51 à 53 sièges, sur 100.

Tour à tour cajoleur et menaçant vis-à-vis de ses adversaires politiques, M. Trump a clairement indiqué qu’il n’entendait pas renoncer à son style. « J’adorerais l’unité, la paix, l’amour », a-t-il lancé, avant de juger qu’il ne pouvait changer de ton en raison de la « malhonnêteté » des médias.

Quelques minutes plus tard, depuis le Capitole, Nancy Pelosi, qui devrait devenir la prochaine « speaker » (présidente) de la Chambre, a poliment décliné l’idée de renoncer à ses projets. « Nous avons une responsabilité constitutionnelle de contrôle », a-t-elle expliqué. « C’est l’équilibre des pouvoirs », a-t-elle insisté.

Politiquement, le président calcule que négocier avec une Chambre démocrate lui facilitera la tâche par rapport à la situation des deux premières années de son mandat, où la majorité républicaine était constamment soumise aux menaces de défections internes, entre les ailes modérées et ultra-conservatrices. A l’inverse, selon lui, les démocrates « se serrent les coudes » et votent en bloc. « Si les démocrates ont une idée pour baisser les impôts, j’y crois beaucoup, j’étudierais absolument l’idée », a-t-il proposé, mettant aussi en avant de possibles compromis sur les infrastructures ou la santé.

« Nous sommes meilleurs »

Mais évoquant les menaces d’enquêtes parlementaires promises par les nouveaux maîtres de la Chambre, notamment pour obtenir ses feuilles d’impôts, il a prévenu: « On ne peut pas faire les deux simultanément (…). S’ils font cela, ils ne feront pas le reste… ».

« Ils peuvent jouer à ce petit jeu, mais nous sommes meilleurs », a menacé Donald Trump. Si les démocrates persistent, « l’Etat sera paralysé », a-t-il ajouté.

Quant à ses déclarations de revenus, qu’il a toujours refusé de rendre publiques contrairement à ses prédécesseurs, il a dit qu’il n’avait pas changé d’avis, invoquant des contrôles fiscaux en cours depuis des années: « Personne ne publie sa feuille d’impôts pendant un contrôle fiscal ».

Les démocrates ont aussi gagné sept postes de gouverneurs –chefs de l’exécutif des Etats– mais ont échoué en Floride, grand Etat qui sera au centre de l’élection présidentielle de 2020 et que les démocrates croyaient mûr pour la reconquête.

La participation a été très forte pour des élections de mi-mandat, sans être toutefois du niveau d’une année présidentielle.

Les chiffres ne sont centralisés par aucune autorité électorale, mais le taux de participation est estimé à environ 47% de la population ayant le droit de vote contre 37% en 2014, selon l’expert Michael McDonald, de l’université de Floride.

« La bataille va se durcir »

A partir de l’entrée en fonction du prochain Congrès, le 3 janvier 2019, Donald Trump ne pourra plus faire adopter ses lois sans transiger avec les démocrates. Ceux-ci ont désormais un droit de veto sur le budget de la nation. Son mur à la frontière mexicaine, qu’il n’avait déjà pas réussi à faire financer dans le Congrès actuel, a toutes les chances de rester virtuel.

Et la Chambre va lancer une myriade d’enquêtes parlementaires sur les conflits d’intérêts, les finances personnelles et les interventions du milliardaire dans l’enquête du procureur spécial sur la Russie.

« La bataille va se durcir. Il y a désormais un veto dans le système pour bloquer Trump et le Sénat », dit à l’AFP le politologue Larry Sabato, de l’université de Virginie.

Le milliardaire s’estime quoiqu’il arrive conforté dans la ligne dure qu’il a adoptée durant la campagne des législatives, focalisée sur le danger représenté selon lui par l’immigration clandestine. Il a commencé sa conférence de presse en énumérant les candidats républicains qui avaient pris leurs distances avec lui pendant la campagne… et qui ont perdu.

Le président sait en outre que les élections de mi-mandat ne peuvent pas servir de présage pour la présidentielle suivante. Barack Obama, après sa « déculottée » de 2010, avait été réélu facilement en 2012.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire