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La transition énergétique a du plomb dans l’aile

Depuis une quarantaine d’années, le monde a peur de manquer d’énergie et de détraquer le climat. Cette double obsession a inspiré aux Nations unies, la mise en oeuvre d’une « transition énergétique » censée assurer, avant la fin de ce siècle, le triomphe des énergies renouvelables, pour esquiver à la fois la fin prévisible des sources fossiles et le changement climatique. Ce paradigme, s’il tient toujours le haut du pavé, a du plomb dans l’aile.

Il devient aujourd’hui évident, en Europe, que la « mise au vert » massive de notre système énergétique, préconisée par le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), est financièrement inaccessible et techniquement utopique. Même les Allemands, qui en furent les plus chauds partisans au point d’y consacrer quelque 100 milliards d’euros, n’y croient plus. Mais la bonne nouvelle, c’est que cette transition ne sera probablement pas nécessaire. Pour deux raisons : la première est que la pénurie des énergies fossiles est beaucoup moins imminente qu’on l’a cru, et la seconde, que leur usage n’a pas d’influence démontrée sur le climat de la planète.

Ce nouveau paradigme, à la fois optimiste et iconoclaste, a émergé d’une journée d’étude qui s’est tenue le jeudi 8 mai dernier au Palais des Académies de Bruxelles, à l’initiative de la SRBE (la Société royale belge des électriciens, active depuis cent trente ans). La thèse officielle du réchauffement par l’effet de serre a été rappelée gentiment par le météorologue Marc Vandiepenbeeck. Des orateurs plus incisifs, comme les professeurs de l’UCL André Berger et Jean-Pascal van Ypersele, avaient décliné l’invitation des organisateurs, condamnant, une fois de plus, l’espoir d’un vrai débat sur le climat en Belgique.

« Ils refusent systématiquement de nous rencontrer », accuse le Pr Michel Erpicum, qui aligne quarante ans d’expérience en climatologie-géographie à l’ULg. Le coeur de son argumentation : « Les outils météo satellitaires -les seuls véritablement capables de couvrir toute la planète – sont trop récents (moins de 30 ans pour la plupart) pour que les climatologues puissent prétendre disposer de séries de données modernes assez longues et complètes pour affirmer un dérèglement de la météo et un changement de la fréquence comme de l’intensité des phénomènes météo catastrophiques. »

Le CO2 : un faux ennemi

Le climatologue liégeois mettait ainsi en évidence un des points de divergence fondamentaux entre les théoriciens du réchauffement anthropique – c’est-à-dire attribué aux émissions de gaz à effet de serre engendrées par les activités humaines – et leurs adversaires climato-sceptiques. Les premiers se fondent principalement sur des modèles informatiques, tandis que les seconds se réfèrent essentiellement aux observations. Et ce hiatus nourrit l’argumentation d’István Markó, professeur de chimie à l’UCL, qui avait fait l’objet, il y a quelques mois, d’une cabale universitaire réclamant sa mise à l’écart pour avoir osé affirmer, en tant que biochimiste, que l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère était bonne pour la végétation.

Le Pr Markó conteste autant la méthode que les conclusions du Giec. Pour lui, « un modèle mathématique, si sophistiqué soit-il, n’est qu’une vue de l’esprit ». Et, s’agissant de ce phénomène extraordinairement complexe et chaotique qu’est le climat, la modélisation « présuppose que l’on connaisse parfaitement les paramètres qui le gouvernent ». Or, poursuit-il, les observations démentent systématiquement les prédictions des modèles. Ainsi :

La courbe du CO2 suit celle de la température ; c’est donc l’augmentation de chaleur qui génère le CO2 et non l’inverse, comme en témoignent les analyses de bulles d’air piégées dans les vieilles glaces polaires. En outre, depuis maintenant seize ans, le réchauffement stagne alors que le CO2 continue d’augmenter.

La part humaine des émissions de CO2 est faible : de l’ordre de 4 %, les 96 % restants étant d’origine naturelle. Un mètre cube d’air – soit 1 million de cm3 – contient actuellement un peu moins de 400 cm3 de CO2, et en gagne chaque année 2 cm3, dont 4 % (ou 0,08 cm3) dus aux activités humaines. « Les termites émettent deux fois plus de gaz carbonique que les humains. Il suffirait donc d’éliminer la moitié des termites pour compenser les émissions humaines », plaisante le biochimiste de l’UCL.

Et cette croissance du CO2, loin d’être une menace, est une promesse pour la planète, dont la surface végétale s’est accrue de 20 % ces vingt dernières années ; « C’est vrai qu’on déboise, mais le verdissement progresse davantage », affirme István Markó pour qui la théorie d’un réchauffement climatique d’origine humaine n’est rien d’autre qu’une supercherie.

De l’énergie pour longtemps

Si les émissions artificielles de gaz carbonique sont en définitive bénignes, sinon bénéfiques, l’humanité n’a plus aucune raison de bouder les énergies fossiles, dont les réserves sont gigantesques et ont été revues constamment à la hausse ces dernières années, affirme Samuele Furfari. Cet expert en énergie auprès de la Commission européenne et professeur à l’ULB ne partage visiblement pas les utopies qui fondent en partie la politique énergétique de l’Union. Mais il part des objectifs 2030 formulés par l’UE pour affirmer qu’à cette échéance, « si les objectifs sont atteints, l’Europe aura encore besoin de 78 % d’énergie non renouvelable ».

Sans même parler de l’énergie nucléaire ni de l’hydroélectricité qui restent des filières d’avenir compétitives, l’humanité dispose d’un stock de pétrole, de gaz naturel et de charbon pour plusieurs siècles de consommation. Les réserves de gaz (gisements conventionnels et gaz de roche mère) sont gigantesques. « Il y a tellement de gaz qu’on ne sait plus qu’en faire », lâche l’expert, qui souligne que l’on commence même à utiliser le gaz liquéfié pour la propulsion des navires. Les réserves prouvées de pétrole ont quasi triplé depuis 1980 (les Etats-Unis en produisent désormais plus qu’ils n’en importent et seront bientôt autosuffisants).

Quant au charbon, dont la production et la consommation ont doublé en trente ans, ses réserves connues – supérieures à cent vingt ans de consommation – se sont gonflées de nouveaux et abondants gisements, découverts notamment en Australie et au Mozambique. Le charbon dont les Américains n’ont plus besoin du fait de leur accès au gaz de schiste (qui a d’ailleurs fait plonger leur bilan CO2 en dessous du seuil fixé par le protocole de Kyoto qu’ils n’ont jamais ratifié) est désormais accessible à bas prix en Europe et ailleurs. Conclusion du Pr Furfari : « La quarantaine amorcée par la crise pétrolière de 1973 est terminée et l’avenir est aux énergies fossiles pour longtemps encore. » De quoi apaiser quelque peu la hantise morose qui entoure le couple infernal énergie-climat ?

Par Jean-Luc Léonard

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