Pierre-Yves Jeholet et René Collin en commission au Parlement Wallon. © BELGA/Bruno Fahy

Veviba doit 3,7 millions d’euros à la Région wallonne

Le groupe Verbist, au coeur du scandale alimentaire Veviba, a reçu depuis 2013 de la Sogepa – l’un des bras financiers de la Région wallonne – 5,5 millions d’euros de prêts dont il doit encore rembourser 3,7 millions d’euros, a indiqué mardi le ministre wallon de l’Économie Pierre-Yves Jeholet.

A ce montant, on peut ajouter 2,88 millions d’euros de primes wallonnes à l’investissement depuis 2001 dans les entités du groupe Verbist, essentiellement pour le site de Bastogne, a ajouté le ministre, entendu avec le ministre de l’Agriculture René Collin (cdH) en commissions conjointes du parlement wallon.

Le gouvernement wallon, pour qui la confiance est rompue à l’égard du groupe Verbist, a envoyé un manager de crise chez Veviba pour envisager une reprise des outils sur les sites de Bastogne et Rochefort, ainsi que le maintien de l’emploi.

« Il faudra veiller à ce que les entreprises intéressées aient un ancrage local et wallon », a souligné M. Jeholet (MR). Des repreneurs potentiels se sont déjà signalés, « mais attention, il ne faudra pas attendre longtemps pour que de grands groupes étrangers fondent sur la proie avec des objectifs et des fins pas très positives ».

Parmi les mesures à prendre pour soutenir le secteur de la viande bovine, le ministre a sollicité l’Agence wallonne à l’exportation (AWEX) afin de « limiter la casse » de cette crise sur l’image du secteur et l’exportation.

« Mon objectif est aussi de récupérer les sommes investies. Tout sera mis en oeuvre pour cela », a assuré M. Jeholet.

Le gouvernement wallon se portera partie civile dans le dossier judiciaire, non seulement pour le dommage financier et économique subi, mais aussi pour le dommage en termes d’image de marque, a assuré le ministre Collin.

Au-delà de la condamnation générale des fraudes, la polémique s’est faite plus vive entre la majorité MR-cdH d’une part et Ecolo d’autre part, après les accusations de la députés Hélène Ryckmans (Ecolo) selon qui le scandale résulte aussi d’un « système cdH ».

Ces accusations sont « d’une malhonnêteté intellectuelle la plus terrible que j’ai vue depuis très longtemps », a dénoncé le ministre Collin, soutenu par son collègue Jeholet et le MR. « Je leur donnerai la meilleure qualification possible, notamment d’un point de vue juridique », a ajouté le cdH.

« Si M. le ministre veut aller en justice c’est son choix », a répondu la députée, qui a précisé que « des responsables cdH ont été dupés par une entreprise mafieuse ».

Elle a dénoncé « le système Verbist », qui permet la fraude parce qu’il concentre 30% du secteur de la viande en Belgique, et s’est interrogée sur l’importance des aides régionales au groupe par rapport à celles accordées aux circuits courts.

Ce à quoi M. Jeholet a répliqué que les prêts avaient été décidés à une époque où Ecolo était aussi au gouvernement, et qu’il possédait un administrateur à la Sogepa. M. Collin a quant à lui énuméré plusieurs investissements gouvernementaux dans les circuits courts, notamment à travers les halls relais.

Le cdH a en revanche rejoint Ecolo dans la volonté de voir les éleveurs et consommateurs impliqués dans les contrôles, éventuellement à travers un modèle coopératif. Le PS Patrick Prévot (PS) n’y est pas opposé non plus, mais a mis en garde contre des dévoiements possibles via des filiales qui prennent la main sur la coopérative, recopiant ainsi un modèle d’industrialisation.

« La faute à l’industrialisation? Si on caricature, peut-être », a répondu le ministre Collin. Mais à ses yeux, personne n’a décidé un jour d’adopter ce modèle. « C’est un fait économique: beaucoup d’opérateurs du secteur – des petits abattoirs – ont disparu en raison de difficultés d’investissement et d’un renforcement sans doute excessif des normes sanitaires. Les experts aussi soulignaient la nécessité d’une concentration plus forte des outils d’abattage, vu le nombre trop important d’opérateurs », a-t-il expliqué.

M. Jeholet n’a pas non plus fermé la porte à l’idée d’une coopérative, mais il a mis l’accent sur la priorité que constitue la récupération des montants dus à la Sogepa.

La filière viande veut « rétablir la confiance et mieux coordonner les contrôles »

Les acteurs de la chaîne de la filière viande ainsi que le gouvernement doivent tout mettre en oeuvre pour rétablir la confiance du consommateur et du producteur, affirment mardi soir les membres de la concertation de la chaîne agroalimentaire après une réunion avec le ministre fédéral de l’Agriculture Denis Ducarme. Ils demandent aussi des contrôles « mieux coordonnés, plus intelligents et plus rigoureux ».

La « clarté totale » doit être faite dans l’affaire du scandale alimentaire impliquant la société Verbist et sa filiale Veviba à Bastogne, selon un communiqué diffusé en début de soirée. « Ce n’est qu’ainsi que la confiance ébranlée pourra être rétablie et que de telles circonstances pourront à l’avenir être évitées. »

Parallèlement, les mécanismes de contrôle existants doivent être inspectés, qu’il s’agisse des autorités de contrôle, de mécanismes privés ou de l’autocontrôle. L’objectif est d’effectuer des ajustements afin d’éviter de nouvelles défaillances.

En toile de fond, la chaîne de la filière viande demande davantage de transparence sur l’origine de la viande ainsi que sur les résultats des contrôles. « Des mécanismes de contrôle renforcés apportent plus que de la sécurité alimentaire mais offrent également la garantie sur l’origine, le mode de production, sur le bien-être animal et sur les aspects de durabilité », appuie-t-elle.

« En ce qui concerne le producteur et le traitement correct de son produit, le secteur s’engage à accélérer et à renforcer les accords de transparence dans la filière bovine », affirment encore les acteurs. « A cette fin, les organisations interprofessionnelles existantes seront renforcées et opéreront de façon interrégionale. Les autorités peuvent soutenir ce processus par une reconnaissance rapide de l’organisation-branche et servir d’interface entre les instances. »

La concertation de la chaîne de la filière viande est composée de l’Agrofront, de la Belgian Feed Association, de la fédération du commerce Comeos, de la fédération de l’industrie alimentaire belge (Fevia), de l’Union des classes moyennes (UCM), de la fédération patronale flamande Unizo et de l’Association belge des marques (BABM).

La Fwa, l’UAW et la FJA mèneront mercredi une action au Parlement wallon

La Fédération wallonne de l’agriculture (Fwa), l’Union des agricultrices wallonnes et la Fédération des jeunes agriculteurs (FJA) mèneront une action mercredi dès 13h au Parlement de Wallonie. Ces organisations demandent la mise en place de nouveaux processus de fonctionnement permettant de garantir une transparence « totale » au sein des abattoirs et des outils de découpe.

L’annonce de cette action intervient après une réunion organisée mardi matin par le ministre wallon de l’Agriculture René Collin avec les acteurs concernés par le scandale alimentaire Veviba.

Une délégation des organisations sera reçue mercredi par des représentants des divers groupes parlementaires. Elle leur transmettra leurs revendications pour plus de transparence au sein des filières agroalimentaires, indiquent la Fwa, l’UAW et la FJA dans un communiqué commun.

Mardi, l’ensemble des maillons réunis au sein de la Concertation chaîne se sont rassemblés en groupe de travail viande bovine au siège de la Fwa à Gembloux, où une méthodologie a été déterminée: « Chaque maillon de la chaîne est invité à formuler des propositions visant à améliorer les méthodes de fonctionnement actuellement en place ainsi que de proposer des nouvelles pratiques susceptibles d’améliorer la transparence au coeur de la chaîne agroalimentaire. Ces propositions doivent être remises pour le lundi 19 et seront traitées une par une par la Concertation lors de sa prochaine réunion fixée le vendredi 23 mars », selon le communiqué.

Le secteur de l’élevage wallon tente de réagir après la mise au jour d’un vaste scandale alimentaire au coeur duquel se trouve le groupe Verbist et sa filiale Veviba à Bastogne. L’abattoir a perdu la semaine dernière ses agréments à la suite d’infractions constatées sur le site.

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