Carte blanche

Conférence de Francken à Verviers ou le combat Booba vs Kaaris de la politique belge

C’était à l’agenda depuis quelques jours, l’ex Secrétaire d’Etat à l’Asile et l’Immigration devait se rendre en Wallonie pour y donner une conférence unique autour de son essai  » Continent sans frontière « . Ces opposants étaient déjà remontés à bloc.

Les informations contradictoires ont circulé : « La conférence se déroulera à Hermalle. Trop tetchy ! Ce sera à Barchon. Mais non pardi, il viendra finalement à Verviers ! ».

L’info de cet hypothétique événement est arrivée aux oreilles des « anti fasciste liégeois ». Ce réseau partagea alors cette indiscrétion à la FGTB Verviers-Ostbelgien qui ni une ni deux, prépara la mobilisation. Le syndicat était dans le devoir d’organiser un rempart pour éviter la propagation des idées nauséabondes du mandataire N-VA.

La face visible : le combat sur le ring

Face à ce scénario, la suite était prévisible : Le rendez-vous était donné par la FGTB aux associations et citoyens « attachés à la démocratie » pour « exprimer pacifiquement que la haine et le rejet ne passeront pas » par la cité lainière. La machine était lancée. Il fallait en être. Toute absence serait interprétée comme une possible tolérance à l’égard des idées de l’ancien Secrétaire d’Etat.

Le scénario est trop beau, trop simple, trop prévisible. Le nirvana fut atteint avec l’annonce de la participation de la Bourgmestre socialiste et Présidente d’Enodia (Ex-Publifin) Muriel Targnion. Deux cents personnes ont finalement fait le déplacement. Syndicats socialiste et chrétien, associations diverses, mandataires locaux, citoyens engagés, pancartes et pétards à la main, étaient chauds bouillant pour montrer leur mécontentement. La Police, bouclier et matraque à la main, bloquait l’entrée de la salle.

Théo Francken ne prendra pas le micro. Sa voiture amochée et sa sécurité mise ne danger, il rebroussa finalement chemin.

Fin de combat. Les articles de presse se succèdent alors, les réseaux sociaux s’enflamment, les discussions font rage. « On ne peut censurer un parlementaire ! ». « La violence est inacceptable ! » « No pasaran ! Pas de ça chez nous ! » « La liberté d’expression a des limites ! ».

En réalité, ce jeu était à somme positive. Les manifestants ont obtenu l’annulation de la conférence ; Théo Francken est la victime – au point de porter plainte – de « l’establishment traditionnel » anti-démocratique et garant de la pensée unique.

La face cachée : les alliances en coulisse

En réalité, l’événement était d’emblée voué à l’échec. Il devait mourir dans l’oeuf à l’image du combat Booba vs Kaaris. Au mieux, les amateurs de catch on a pu voir les prémices d’un mauvais combat.

Ce spectacle désolant et pathétique illustre en réalité l’état de la politique belge. Mais le pire n’est sans doute pas la participation aveugle des associations ou les discussions stériles de la population. C’est plutôt du côté de la vacuité des analyses et du manque de réflexivité qu’il faut regarder. Le voile autour de cette tromperie n’a jamais été levé. En public, le combat. En coulisse, les alliances.

En public, le PS dénonce le racisme de la N-VA. La présidente de « la plus grande intercommunale au monde » Publifin affronte le poulain de la N-VA. Le PS s’oppose à l’immoralité des nationalistes. En coulisse, la N-VA garantit l’immunité d’un parlementaire corrompu. Bart de Wever partage le couvert avec Stéphane Moreau. Les pensions des travailleurs liégeois servent à graisser la patte des « amis » du sérail.

Pour quel résultat ?

Des centaines d’articles se sont succédé depuis la séance du conseil communal d’Olne du 19 décembre 2016 où la spirale de l’affaire Publifin prend sa source. Depuis, rien n’a changé. Les recommandations de la commission d’enquête sont restées lettre morte. Les top managers sont toujours en place. Les parlementaires les plus actifs dans ce débat avouent à demi-mot leur impuissance. Les scandales se poursuivent. Les journalistes accumulent les menaces.

En réalité, la démocratie belge est malade. Ce n’est pas un hasard si la défiance dans les élus et dans les partis atteint des niveaux record. Les enquêtes d’opinion montrent que plus de 75% des citoyens pensent que les élus sont d’abord intéressés par leur intérêt personnel et ne sont pas des personnes de confiance. Cette défiance envers les élus déborde sur les institutions et principes au coeur de la démocratie.

Ces indicateurs, tous au rouge, n’empêchent nullement les élus de poursuivre leur trajectoire. La fin justifie les moyens disait Machiavel. Alors ce coup-ci, les Kairis et Booba de la politique belge ont sans doute encore gagné. Mais jusqu’à quand ?

Alcide Bolmain, Artiste peintre et citoyen verviétois

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