Un hybride entre végétal et nanotechnologie. © Kirill Savenko/iSTock

Mi-plante, mi-machine : voici la feuille bionique

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Repérer des mines antipersonnel en changeant de couleur, détecter du gaz sarin, prévenir d’une pollution du sol ou d’une sécheresse imminente, mais aussi singer la photosynthèse, afin de produire de l’hydrogène utilisable comme carburant : capables de (presque) tout, les plantes bioniques excitent la planète scientifique.

Des Etats-Unis à l’Inde, en passant par la Nouvelle-Zélande, plusieurs équipes planchent sur le sujet, même si la commercialisation de ces  » superplantes  » se joue principalement entre les équipes de Nathan Lewis à Caltech (California Institute of Technology) et de Daniel Nocera à Harvard. La Nasa est très intéressée par cette innovation qui pourrait lui être fort utile dans ses missions spatiales.

De toutes parts, les brevets vont bon train. Mais qu’est-ce qu’une  » feuille bionique  » ? Et comment fonctionne-t-elle ? Première précision : l’interface entre la biologie des plantes et les nanotechnologies se nomme la nanobionique végétale, un champ de recherches créé par le Massachusetts Institute of Technology (MIT), en 2014 et considéré comme la technologie émergente du moment. Il ne s’agit pas ici de génie génétique et d’OGM. Le concept est d’intégrer des systèmes électroniques dans la structure de n’importe quel végétal, afin d’obliger ce dernier à réaliser des tâches pour lesquelles il n’est pas prévu ; des missions commandées par l’homme. Ce faisant, on crée une espèce de chimère, un hybride vivant technologique, au service de l’humanité.

Au niveau éthique, d’aucuns estiment que l’affaire est discutable. Greenpeace s’est déjà élevée contre ce principe de chimères mi-machines, mi-végétaux. Reste aussi le possible risque (similaire à celui des végétaux OGM) de la contamination des plantes non bioniques par ces végétaux chimériques. Officiellement, l’enjeu de la nanobionique végétale est louable : sauver des vies humaines, tout en améliorant globalement le sort de la planète. Le tout, grâce à des plantes d’un nouveau genre, ni végétales, ni machines, capables de  » communiquer  » avec les hommes. Par exemple, un simple smartphone avec une caméra infrarouge suffit pour établir que des épinards ont détecté des mines antipersonnel : en changeant de couleur, ils vont signaler aux humains la présence d’explosifs.

Mais pas question de s’enrichir sur le dos de cette nouvelle technologie. Fin mars 2018, le chimiste Daniel Nocera, qui a mis au point, pour ses plantes bioniques, un étonnant système de production de biocarburant, calqué sur la photosynthèse, a expliqué qu’elles devaient, en priorité, aider les pays pauvres à avoir un accès à l’énergie. Avec de l’eau (ou même de l’urine ou de l’eau de mer), du soleil, ses feuilles bioniques et son nouveau process, Nocera veut énergiser le monde. Aujourd’hui, plus de 75 % de la population d’Afrique subsaharienne reste privée d’électricité.

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