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La science de l’orgasme: ne jamais croire un acteur porno

C’est la journée de l’orgasme. Or selon une étude récente, un coït entre deux personnes ne durerait jamais plus de quelques minutes en moyenne. Le plaisir du sexe, surtout chez les femmes, doit donc se trouver ailleurs.

L’homme n’a plus d’os dans son pénis. Il aurait disparu il y a de cela près de 2 millions d’années. Cet os est surtout utile aux espèces polygames où les mâles doivent rester plus longtemps dans la femelle pour que ce soit eux qui fécondent leur dulcinée et pas celui qui passerait, par hasard, juste après. Ce petit os permet de rendre possible une longue pénétration alors qu’un simple gonflement de l’attribut, comme c’est le cas chez l’homme, ne suffit pas.

Les premiers de nos ancêtres, les Homo erectus en tête, ont évolué d’un mode polygame vers la monogamie: ils avaient plusieurs longues relations exclusives l’une à la suite de l’autre. C’est l’une des raisons de notre succès à travers l’évolution puisque les petits avaient leurs deux parents pour les aider à grandir. Tout en offrant la possibilité non négligeable de ne pas fermer les options génétiques en permettant, une fois le bébé devenu enfant, de changer de partenaire pour le suivant.

Dans un entourage monogame, il y a moins de risque de concurrence lors de la fécondation. Ce qui rend inutile une longue copulation. Des chercheurs belges ont par ailleurs démontré dans une étude parue dans Trends in Ecology and Evolution que lors du siècle dernier les « enfants coucou » ( les enfants qui était d’un autre père que l’officiel) n’étaient que de 1%. Soit bien moins que les 10% que l’on pensait jusqu’alors. Dans un tel contexte, l’os du pénis est donc complètement obsolète. Et comme la nature n’aime pas trop s’encombrer de choses inutiles, nous avons perdu un élément de notre anatomie.

Le coup modeste

Un autre aspect de cette étude a moins éveillé l’attention: c’est que les mammifères non pourvus d’un os pelvien avaient un coït qui durait moins de trois minutes. Et contrairement à l’avis général, ce serait aussi le cas pour les humains : le temps moyen d’une pénétration est autour des deux minutes. La « baise sans fin » vantée dans les mauvais films pornos est tout sauf réaliste. Une partie de jambe en l’air complète ne durerait que 6 minutes (et ne brûlerait que 20 calories, ce qui fait que le sexe n’est pas vraiment une activité physique).

Ce que nous ne saurons probablement jamais c’est si l’homo erectus a connu d’autres sortes de plaisir sexuel. Mais que cela ne nous empêche nullement de spéculer sur le sujet. L’une des différences essentielles entre l’homme moderne et le chimpanzé est que, chez nous, la période de fécondité de la femme est cachée. La femelle chimpanzé en fait au contraire la promotion. Au point d’attirer les inopportuns et de mettre en péril sa santé. Le risque d’être blessé par des mâles trop pressants est en effet bien réel. En n’affichant pas sa période d’ovulation, la femme s’évite ce genre de tracas.

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Mais, dans de telles conditions – soit en ne sachant pas exactement quand l’on doit s’accoupler pour nous reproduire-, la nature a dû finasser pour ne pas mettre en danger la survie de l’espèce. Et pour cela augmenter le nombre de relations sexuelles de manière proportionnelle au risque de rater la fenêtre de fécondité. Pour faire court : le plus souvent possible. Et pour rendre le sexe régulier attractif, la nature a rendu l’activité plaisante. Mieux même : elle a associé plaisir et fécondation au travers de l’éjaculation. L’orgasme masculin est donc une conséquence de l’évolution. C’est même probablement ce qui a empêché notre espèce de s’éteindre après le camouflage de la période de fécondation de la femme.

L’histoire se complexifie tout de même si l’on regarde le rôle de la femme. L’idée de base est-elle que la femme éprouve du plaisir ou est-ce simplement pour faire des enfants ? C’est une question difficile, surtout parce que les scientifiques se cassent les dents sur le rôle de l’orgasme chez la femme. On ne sait pas vraiment si cela a un rôle dans la survie de l’espèce ou si cela joue un rôle dans la formation d’un couple, par exemple en permettant d’associer une bonne entente sexuelle à une bonne entente tout court (ce qui est aussi le cas chez l’homme).

La tentation est grande d’associer le plaisir sexuel féminin à la plus non biologique des inventions: soit le développement d’un contraceptif efficace dans la seconde moitié du siècle dernier. Cela a rendu possible aux femmes de ne plus être systématiquement enceinte , ou en train d’allaiter, si elles n’étaient pas extrêmement prudentes. Un stress rarement gage de bon sexe.

Les femmes ont aussi gagné en indépendance et la révolution sexuelle est passée par là. Du coup, le sexe est bien plus centré sur le plaisir que sur la reproduction de l’espèce. Pourtant on retrouve déjà des traces du plaisir sexuel, aussi féminin, dans les écrits anciens. En Inde, le Kama Sutra en est un mode d’emploi détaillé et explicite. De cette même période, on retrouve la mythologie grecque du devin aveugle Tirésias. Selon une version du mythe, il aurait été rendu aveugle par Hera, car il aurait prétendu que la femme éprouvait plus de plaisir qu’un homme. Et il maîtrisait le sujet parce qu’il avait été un temps transformé en femme lors d’une précédente mésaventure. Courroucée par la réponse qui la mettait en porte-à-faux avec Zeus – avec qui elle avait parié que l’homme avait de plaisir- la déesse lui aurait enlevé la vue.

Bref, il semble que les êtres humains, dès qu’ils avaient du temps à consacrer à autre chose qu’à survivre, ne réduisaient pas la sexualité à une simple technique de procréation.

Des expériences sans lendemain

À quelle fréquence les femmes ont-elles un orgasme ? Il n’y a que très peu de données historiques utiles sur le sujet. Selon le magazine Socioaffective Neuroscience & Psychology, qui s’appuie sur une importante base de données réalisée en Finlande, il n’y a eu que peu de changements ces dernières 50 années. Et ce, malgré la révolution sexuelle et le fait que le sujet ne soit plus tabou. La fréquence à laquelle la femme se masturbe par contre a, elle, augmentée, tout comme le nombre de partenaires sexuels. Ces derniers sont en hausse, car les coups d’un soir sont plus faciles et qu’elles se débarrassaient plus promptement des mauvais amants. Cette base de données remonte à 1979.

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Une autre étude rapportée dans ce même magazine va encore plus loin sur les possibles fonctions biologiques de l’orgasme féminin. Il n’existe toujours pas, malgré les nombreuses recherches, de preuves solides que l’orgasme facilite la fécondation. Les femmes peuvent sans aucun problème être enceintes sans avoir éprouvé du plaisir. Avant, alors que la science était aussi un milieu très macho, on pensait possible que l’orgasme féminin existait pour faire plaisir à l’homme (ils étaient merveilleux tout de même). Ou, encore mieux, que de cette façon la femme reste couchée. De quoi faciliter le travail au sperme qui ne s’écoulerait plus. Aujourd’hui, il n’y a plus personne pour oser avancer de telles élucubrations.

Il reste deux explications plausibles. La première est que c’est une apparition biologiquement inutile, sans fonction spécifique. Ce qui dans la nature est rare, mais pas impossible. Il existe encore deux variantes à cette option. La première n’est pas neuve : l’orgasme est un effet secondaire de l’orgasme masculin. Elle se base sur le fait que le pénis et le clitoris sont issus d’un même bloc de tissu embryonnaire. Un phénomène un peu similaire au fait que les hommes possèdent des tétons alors qu’ils n’allaitent pas. Cette première explication est néanmoins mise à mal par le fait que le plaisir masculin ne vient que lorsque les hormones mâles se réveillent, soit bien après le développement embryonnaire.

Du sexe avec des personnes riches

Une autre option, en tenant compte de « l’inutilité » biologique de la chose, est que l’orgasme féminin ne serait qu’un reliquat d’une période lointaine. Une période où il aurait été utile pour stimuler les hormones qui favorisent l’ovulation. Un des éléments qui plaide pour cette théorie est que le clitoris, dans le courant de l’évolution, s’est peu à peu éloigné du vagin. Ce qui a permis au plaisir d’être détaché de l’acte reproducteur. L’un des points de base de l’étude publiée dans The Journal of Experimental Zoology est que seul un tiers des femmes éprouve régulièrement un orgasme lors d’une pénétration. Ces résultats ne sont pas pris au sérieux dans tous les cercles scientifiques. Certains ont du mal avec l’idée qu’un mécanisme qui aurait perduré durant aussi longtemps n’a plus aucune fonction.

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C’est pourquoi ils sont nombreux à dire que sa principale fonction est que l’orgasme féminin facilite le choix d’un bon partenaire. Ils brodent en cela autour de la théorie parue en 2012 et qui dit que l’orgasme féminin dépend aussi du partenaire. Parfois ça marche, parfois pas. Les préliminaires et l’ambiance y joueraient un rôle non négligeable. Pas surprenant lorsqu’on sait que l’orgasme n’a souvent rien à voir avec le coït.

En 2009, une étude de la banque de données chinoise Evolution and Human Behavior, sous l’impulsion d’un biologiste belge, concluait que les femmes avaient plus facilement un orgasme si elle avait une relation sexuelle avec un homme riche. Les résultats ont cependant dû être modifiés après que l’on se soit rendu compte qu’il y avait une faute statistique. Cela n’a pas empêché l’information de circuler et d’être prise pour vraie. Surtout dans les milieux masculins et aisés.

Les études les plus récentes tendent plutôt à montrer que la femme a plus facilement un orgasme avec un homme qu’elle trouve agréable. Soit marrant, créatif, fiable et qui sent bon. Des aspects purement physiques comme un corps d’athlète ou un look tendance semblaient moins déterminants lorsqu’il s’agissait d’orgasme. De quoi abonder dans le sens de la théorie qui veut que l’orgasme joue un rôle dans le choix du partenaire. D’ailleurs, les femmes sont nombreuses à dire qu’elles ne devaient pas nécessairement avoir un orgasme pour éprouver du plaisir. 16% des Allemandes n’auraient jamais eu un orgasme avec leurs partenaires et 22% que très rarement.

Une étude récente dans Evolution and Human Behavior montre aussi que le sexe peut être instrumentalisé pour entretenir une relation, et n’est donc pas qu’une question de plaisir. Les femmes qui sont dans une relation longue perdent leur appétit sexuel, mais n’en sont pas moins sexuellement actives ou n’en ont pas moins d’orgasmes. Elles voient le sexe surtout comme quelque chose qui permet d’entretenir de bonnes relations avec leur conjoint.

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