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Venezuela: nouvelle nuit de troubles à Caracas

Le Vif

Violences et pillages ont marqué la nuit de jeudi à vendredi à Caracas, après une nouvelle journée de protestations au Venezuela contre le président Nicolas Maduro, jalonnée d’affrontements.

En trois semaines, les violences ont fait huit morts lors des manifestations de l’opposition, qui veut continuer de mobiliser.

L’opposition a convoqué pour samedi une « marche du silence », lors de laquelle les protestataires se dirigeront vers les sièges de l’épiscopat vénézuélien dans tout le pays, et pour lundi un « blocage national » des routes.

Aucun rassemblement n’est en revanche prévu pour vendredi.

Jeudi, au lendemain de vastes manifestations qui avaient fait trois morts, plusieurs milliers de personnes ont de nouveau manifesté à Caracas pour réclamer le départ du président socialiste Nicolas Maduro, très impopulaire dans ce pays pétrolier plongé dans une grave crise politique et économique.

Des incidents ont eu lieu dans la capitale ainsi que d’autres villes: Maracaibo, Valencia et San Cristobal, respectivement dans le nord-ouest, le nord et l’ouest du Venezuela.

Dans la capitale, des désordres et tentatives de pillage ont suivi les manifestations dans une dizaine de secteurs situés dans l’ouest, surtout à El Valle.

Des résidents d’El Valle ont déclaré dans la nuit sur les réseaux sociaux qu’on entendait des tirs et que des véhicules anti-émeutes avaient dispersé de petites manifestations anti-Maduro. Des images tournées par les habitants montraient l’un de ces véhicules partiellement incendié par des cocktails Molotov.

Maternité évacuée

L’évacuation d’une maternité d’El Valle alors que s’affrontaient opposants et forces de sécurité a suscité une controverse entre le gouvernement et l’opposition.

Selon la ministre des Affaires étrangères Delcy Rodriguez, « des bandes armées engagées par l’opposition ont attaqué une maternité avec 54 enfants ». Mais selon un député de l’opposition, Juan Manuel Olivares, les nouveau-nés ont dû être évacués parce qu’ils étaient « très affectés » par les tirs de grenades lacrymogènes des forces de l’ordre contre les opposants.

« Personne ne se rend, notre devoir est de défendre la Constitution », a lancé Henrique Capriles, l’un des chefs de l’opposition et ancien candidat à l’élection présidentielle de 2013.

Le gouvernement a accusé les responsables de l’opposition de fomenter des violences. « Ces délinquants veulent faire croire que le Venezuela est dans le chaos, le pays est calme », a déclaré Freddy Bernal, un dirigeant du parti socialiste au pouvoir.

« Je m’en fiche d’avaler du gaz, je m’en fiche de mourir, mais nous devons sortir de cette merde de gouvernement assassin et répressif », a déclaré jeudi à l’AFP une manifestante de Caracas, Natasha Borges, 17 ans.

« Ne lancez plus de bombes, s’il vous plaît », a crié juché sur un véhicule blindé militaire un manifestant nu, portant seulement des chaussures de sport et des chaussettes, qui s’était calmement dirigé vers les forces de l’ordre au milieu des affrontements, à travers un nuage de gaz lacrymogène.

M. Maduro a tourné cette scène en dérision, la qualifiant de « show » dans une déclaration télévisée.

La vague de manifestations qui a commencé le 1er avril à l’appel de l’opposition, majoritaire au Parlement depuis fin 2015, vise à exiger des élections anticipées pour faire partir le président Maduro.

Les violences autour de ces défilés ont déjà fait huit morts en trois semaines, dont trois jeudi. Des dizaines de personnes ont été blessées et environ 600 ont été arrêtées, selon l’ONG Foro Penal.

« Je suis fatigué, oui, mais il nous faut avoir du courage. Moi, je suis disposé à sortir dans la rue tous les jours si c’est nécessaire », a déclaré à l’AFP Aquiles Aldarozo, étudiant de 22 ans.

Il portait une pancarte sur laquelle était écrit « Celui qui ne bouge pas n’entend pas le bruit de ses chaînes ».

Inquiétude de l’ONU

La pression internationale se maintient: l’Union européenne a condamné les violences « très regrettables » survenues pendant les manifestations et a appelé à une « désescalade » pour « stopper la détérioration de la situation ».

Amnesty International s’est alarmée de la « répression ».

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a demandé « que tous les efforts soient faits pour réduire les tensions et empêcher de nouveaux affrontements ».

Neuf pays latino-américains ont jugé, dans un communiqué commun, « urgent que les autorités vénézuéliennes prennent des mesures pour garantir les droits fondamentaux et préserver la paix sociale ».

M. Maduro a activé mardi un plan de défense renforçant la présence policière et militaire pour déjouer un « coup d’Etat terroriste » fomenté selon lui par les Etats-Unis, une accusation rejetée par Washington.

Le mandat de M. Maduro court jusqu’à fin 2019. Selon un sondage Venebarometro, sept Vénézuéliens sur dix souhaitent son départ.

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