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Pakistan: cinq choses à savoir sur le soufisme

Le Vif

Au moins 88 personnes ont péri dans un attentat-suicide jeudi soir contre un sanctuaire soufi dans le sud du pays. Les soufis sont régulièrement la cible d’attentats au Pakistan.

– Qu’est-ce que le soufisme ? –

Le soufisme, une branche mystique et tolérante de l’islam est présent au Pakistan depuis des siècles. Ses adeptes ont contribué à la diffusion de l’islam sur le sous-continent indien au XIIIe siècle.

Les soufis croient aux saints, dont ils pensent qu’ils peuvent intercéder directement auprès de Dieu en leur faveur. Ils sont dépourvus de hiérarchie et d’organisation, préférant rechercher une communion spirituelle via la musique et la danse dans les sanctuaires dédiés aux saints.

Ils tolèrent la minorité chiite et ne restreignent pas l’accès des femmes à leurs rituels, même si les deux sexes y sont parfois séparés.

– Le soufisme est-il populaire ? –

Le nombre d’adeptes du soufisme est estimé à plusieurs millions au Pakistan, même s’il a perdu en influence ces dernières années face à des groupes plus conservateurs, voire fondamentalistes.

La plupart d’entre eux vivent dans les provinces du Pendjab (centre) et du Sindh (sud). La ville de Multan, située dans le Pendjab est considérée comme l’ancienne cité des saints. Le Sindh compte des centaines de sanctuaires, pour certains anciens de plusieurs siècles.

Beaucoup de Pakistanais fréquentent ces sites dans l’espoir de voir leurs prières exaucées, offrant à l’occasion des aumônes aux pauvres et des offrandes aux gardiens des sanctuaires.

Les plus importants d’entre eux, comme celui de Lal Shahbaz Qalandar où s’est produit l’attaque, peuvent voir défiler des centaines de milliers de personnes par an, notamment lors de festivals appelés « urs ».

– Où le soufisme est-il pratiqué ? –

Le soufisme est répandu dans tout le monde islamique, en particulier en Iran, Afghanistan, Pakistan et en Turquie. L’un des soufis les plus célèbres est le poète Roumi, qui serait né en Afghanistan, mais que revendique aussi l’Iran, et qui a passé la plus grande partie de sa vie en Turquie. C’est là que son fils a fondé l’Ordre des Derviches Tourneurs, célèbre dans le monde entier.

– Pourquoi les soufis sont-ils pris pour cible ? –

Les soufis croient que la descendance des saints (ou pirs) héritent d’un accès privilégié à Dieu, une notion considérée comme hérétique par les Talibans ou des groupes comme l’Etat islamique. Ils la considèrent en effet en contradiction avec l’assertion, centrale dans l’islam, que « il n’y a de Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète ».

Au Pakistan, les sites soufis représentent des cibles faciles pour les extrémistes, souligne le général à la retraite Talat Masood. Ils accueillent fréquemment des centaines de personnes rendues euphoriques par le son des tambours et le haschich, sont peu sécurisés et parfois situés dans des zones rurales éloignées. Leurs fidèles viennent souvent de milieux modestes, et beaucoup de femmes et d’enfants assistent aux cérémonies.

L’EI avait déjà revendiqué en novembre dernier un attentat-suicide dans un sanctuaire soufi reculé au Baloutchistan, qui avait fait au moins 52 victimes.

– Qui était Lal Shahbaz Qalandar? –

Le saint à qui est dédié le site qui a été attaqué jeudi était un saint musulman ascète du XIIIe siècle. Originaire de ce qui est aujourd’hui l’Afghanistan, il est venu dans l’actuelle province du Sindh, selon des historiens.

« Qalandar » est un titre honorifique, tandis que « Lal » veut dire rouge, bien que l’on ignore pourquoi ce surnom lui a été attribué. Son vrai nom aurait été Syed Mohammad Usman Marwandi.

Le vénérable sanctuaire qui lui est dédié, avec son dôme doré, est considéré au Pakistan comme un symbole de spiritualité et de tolérance. Des centaines de milliers de personnes le visitent chaque année.

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