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Andrea Nahles, première femme à la tête des sociaux-démocrates allemands

Le Vif

Andrea Nahles doit devenir dimanche la première femme à présider le Parti social-démocrate (SPD) allemand, avec pour mission de sortir de la crise la plus vielle formation politique du pays.

Cette fille de maçon de 47 ans, dont 30 au sein du SPD, va sauf imprévu décrocher dans l’après-midi le poste lors d’un congrès extraordinaire du parti à Wiesbaden (ouest), le seul suspense concernant son score.

L’élection d’Andrea Nahles à la tête du SPD – qui participe au gouvernement au sein de la « grande coalition » – va accentuer une tendance à la féminisation des fonctions dirigeantes dans le monde politique allemand.

Pour la première fois aussi, les deux plus grands partis nationaux seront dirigés par une femme, avec Angela Merkel chez les conservateurs. Les femmes occupent aussi des postes-clés à la tête de la gauche radicale, des écologistes et de l’extrême droite.

Andrea Nahles remplacera Martin Schulz, porté à la tête du parti en mars 2017, avant de le conduire à sa plus cuisante défaite électorale le 24 septembre et d’être poussé sans ménagement vers la sortie en février par ses « camarades ».

Il reviendra à Andrea Nahles de recoller les morceaux dans une formation très divisée, qui s’est embarquée à contre-coeur dans une troisième « grande coalition » avec la chancelière Angela Merkel.

« Je crois que je peux » le faire, a-t-elle dit vendredi. Un sondage de la télévision publique ARD montre qu’une majorité des personnes interrogées pense le contraire.

Il « en va désormais de la survie » du deuxième parti d’Allemagne menacé par la montée de l’extrême-droite, souligne Der Spiegel samedi, « et il dépend d’elle que cela réussisse ».

« Crédible »

« En tant que représentante de l' »establishment », Andrea Nahles n’est pas forcément la mieux placée pour initier la nouvelle orientation » dont le SPD a besoin, indique toutefois à l’AFP Matthias Micus, analyste de l’institut de recherche sur la démocratie de Göttingen.

Elle appartient depuis deux décennies aux instances dirigeantes du parti, né il y a presque 155 ans.

Mais alors qu’il s’agit de le repositionner à gauche, cette mère d’une petite fille de 7 ans, réputée proche du peuple, est « crédible », dit-il.

Et elle peut s’appuyer sur un solide réseau dans le parti, malgré sa réputation de « tueuse de rois » qui la poursuit en particulier depuis qu’elle a provoqué la chute d’un précédent président du SPD, Franz Müntefering, en 2005.

Actuellement présidente du groupe parlementaire SPD au Bundestag, elle a aussi fait ses preuves en tant que ministre du Travail dans le précédent gouvernement.

A ce poste, elle s’est battue pour la mise en place d’un salaire minimum, une révolution en Allemagne. Elle a aussi imposé une nouvelle loi sur les retraites, dont une disposition très critiquée prévoit un départ dans certains cas dès 63 ans (au lieu de 67).

« Plein la gueule »

Elle est connue pour ne pas mâcher ses mots. Mon père « a atteint l’âge de 73 ans, avec les épaules, le dos et les genoux cassés. Et quand j’entends je ne sais quel cul de plomb de professeur parler de retraite à 70 ans, alors ça me met vraiment en rogne! », avait-elle fait savoir à des détracteurs de sa réforme.

Après les législatives, celle que le journal populaire Bild a qualifiée – peut-être pour sa propension à jurer-, de « seul vrai mec du SPD » avait promis aux conservateurs de leur « en mettre plein la gueule ».

Le sang chaud, il n’est pas rare qu’elle termine ses discours au bord de l’extinction de voix. « J’ai un tempérament peut-être un peu volcanique », reconnaît-elle dans un entretien au quotidien Süddeutsche Zeitung samedi.

Divorcée, partiellement handicapée de la hanche après un accident de voiture, elle fait régulièrement les allers et retours entre Berlin et son village de Weiler, dans l’Ouest du pays, pour retrouver sa fille, dont s’occupe sa mère.

Dans un livre autobiographique en 2009, elle a essayé de montrer qu’elle n’était pas seulement cet animal politique avide de pouvoir que certains voient en elle.

Elle s’est présentée aussi en provinciale, fervente catholique, qui n’aime rien autant que sa famille.

Une dichotomie qui ne date pas d’hier. Reçue au bac en 1989, elle avait écrit dans le journal de la classe comme souhait de carrière: « femme au foyer ou chancelière ».

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