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Ancrage socialiste ou retour de la droite: le Chili élit son président

Le Vif

Le Chili vote dimanche au second tour de la présidentielle pour choisir un successeur à Michelle Bachelet, un scrutin qui s’annonce très serré entre le journaliste socialiste Alejandro Guillier et l’ex-chef d’Etat de droite Sebastian Piñera, avec l’extrême gauche en position d’arbitre.

Quelque 13,4 millions d’habitants sont appelés à se rendre aux urnes, entre 08H00 (11H00 GMT) et 18H00 (21H00 GMT), pour des résultats attendus autour de 23H00 GMT.

Près de 40.000 Chiliens de l’étranger –présents dans 62 pays– ont commencé à voter dès samedi soir, notamment à Wellington, en Nouvelle-Zélande.

Donné archi-favori, M. Piñera, l’ex-chef d’Etat (2010-2014) de droite et milliardaire, est bien arrivé en tête au premier tour, mais avec un score bien moindre que prévu (36,6%), devant Alejandro Guillier (22%), 64 ans.

Contre toute attente, la candidate d’extrême gauche, Beatriz Sanchez, 46 ans, également journaliste, a quant à elle réussi une prouesse en décrochant 20% des suffrages, devenant ainsi la troisième force politique du pays.

Les électeurs de Mme Sanchez –qui n’a pas donné de consigne de vote mais a confié qu’elle voterait pour M. Guillier– pourraient ainsi faire pencher la balance.

Le 19 novembre, les six candidats de gauche avaient totalisé 55% des voix.

Le Chili, une des principales économies d’Amérique latine, a été dirigé ces quatre dernières années par la socialiste Michelle Bachelet, qui a bouleversé cette société réputée très conservatrice par une série de réformes progressistes, dont l’adoption du mariage homosexuel et la dépénalisation de l’avortement, auparavant interdit.

La loi ne lui permet pas de se représenter, et le vent souffle désormais vers la droite dans la région: l’Argentine avec Mauricio Macri, le Brésil avec Michel Temer, le Pérou avec Pedro Pablo Kuczynski, tous ont désormais des présidents conservateurs, marquant la fin d’un cycle pour la gauche latinoaméricaine.

Le second tour est donc un « des plus incertains depuis le retour de la démocratie », estime le directeur du Centre d’analyse de l’université de Talca, Mauricio Morales.

Après l’échec retentissant des instituts de sondages, dont certains sont accusés d’avoir sous-évalué Beatriz Sanchez, les Chiliens « ne disposent pratiquement pas d’information crédible ou fiable permettant de prédire un résultat », ajoute-t-il.

La dernière enquête, du 1er décembre, donnait les deux adversaires à égalité, avec encore 21,4% d’indécis.

Parlement fragmenté

« L’élection va être très disputée », prédit René Jara, analyste de l’université de Santiago, pour qui la présidence devrait se jouer à moins de 100.000 voix.

Et elle « va dépendre de la quantité de personnes qui iront voter », souligne Rodrigo Osorio, professeur de sciences politiques à l’université de Santiago. « Plus la participation sera importante, plus Guillier aura des chances de gagner », après un premier tour où seuls 46,7% des électeurs s’étaient déplacés.

Sebastian Piñera, 68 ans, a lui reçu le soutien du candidat de l’extrême droite José Antonio Kast, qui a remporté 7,9% des voix en revendiquant l’héritage du dictateur Augusto Pinochet (1973-1990).

Quel que soit le vainqueur de dimanche, il n’aura pas de majorité au Parlement. Les législatives, organisées lors du premier tour et pour la première fois avec un scrutin à la proportionnelle, ont laissé un paysage fragmenté dans les deux chambres.

Le futur locataire du palais présidentiel de La Moneda aura « besoin de nouer des alliances » avec les autres groupes parlementaires, ajoute M. Osorio, qui estime que ce sera plus facile pour le socialiste que pour le conservateur.

Le successeur de Mme Bachelet à la tête de la cinquième puissance de la région aura en revanche l’économie avec lui. Après quatre années de croissance ralentie à 1,8% en moyenne, le PIB grimpera de 2,8% en 2018, selon la Cepal, commission économique de l’ONU pour l’Amérique latine.

Marqué par 17 années de dictature sous Pinochet, le Chili représente depuis les années 1990 un pôle de stabilité politique et de dynamisme économique dans la région.

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