Laurette Onkelinx © Debby Termonia

Laurette Onkelinx: « Je n’ai jamais envisagé sérieusement d’être présidente du PS »

Han Renard

« Il faudra du temps pour reconquérir les coeurs des gens », déclare Laurette Onkelinx, « mais mon parti est sur la bonne voie. »

Pour le PS, 2017 sera une année difficile à oublier. Après près de deux ans de scandales politiques et financiers autour de l’intercommunale liégeoise Publifin, c’est la bombe Samusocial qui a éclaté. Il s’est avéré que les administrateurs socialistes s’étaient grassement rémunérés pour les services non prouvés, aux frais des sans-abris. Même si elle n’était aucunement impliquée dans les scandales, Laurette Onkelinx a été touchée par le déshonneur. Après avoir hésité, Onkelinx a liquidé son buddy politique Yvan Mayeur, le bourgmestre bruxellois. Ensuite, elle a annoncé lors d’une conférence de presse qu’elle abandonnerait définitivement la politique en 2019. Un choix dont, en témoigne son énergie aujourd’hui, elle est heureuse.

Manifestement, vous ne regrettez pas votre décision.

Certainement pas! J’ai fait de la politique intensément pendant trente ans. J’avais le sentiment d’avoir fait le tour. J’étais un peu lassée. J’aurais pu évidemment aussi ralentir en douceur et lors des prochaines élections redevenir tête de liste et députée. Mais je n’en avais plus envie. Je souhaite reconquérir ma liberté, redevenir maître de mon avenir. Je ne resterai pas les bras croisés. Je continuerai à lutter contre l’injustice, mais d’une autre façon.

Votre décision est-elle aussi liée au fait que, selon beaucoup de gens, le rôle de chef d’opposition à la Chambre ne vous convenait pas, après avoir été vice-Première ministre pendant quinze ans ?

Pas du tout, et je ne l’ai jamais senti ainsi. À l’époque, j’ai proposé à Elio Di Rupo de devenir chef de groupe, et je trouve que je m’en suis très bien sortie. Lors de l’entrée en fonctions du gouvernement Michel en 2014, j’ai pris un départ fulgurant : tout le monde était d’accord.

Pourtant, l’année politique écoulée n’a pas été une partie de plaisir: après l’éclatement du scandale du Samusocial, vous avez dû contraindre votre ami politique Yvan Mayeur à démissionner.

Cela non plus n’a pas joué de rôle dans ma décision d’arrêter. Ce n’était pas facile : je connais bien Yvan Mayeur. Il a commis une erreur, et il a été lourdement puni, mais je n’aime pas la façon dont il est réduit à ce faux pas. Il n’est plus rien du tout. Un homme désespéré. Je ne veux pas oublier toutes les bonnes choses qu’il a faites. Il a fondé le Samusocial et a contribué à la lutte contre la pauvreté à Bruxelles. En tant que président du CPAS, il a également fourni un travail exceptionnel.

Évidemment, la situation de mon parti ne m’a pas rendue joyeuse, avec les affaires à Liège et à Bruxelles, mais nous avons réussi à maîtriser l’affaire. Les intéressés individuels ont été punis et expulsés du parti, et nos règles déontologiques ont été durcies. À présent, nous exigeons une transparence complète de toutes les rémunérations de nos mandataires. À l’avenir, les bourgmestres ou échevins de communes de plus de 50 000 habitants ne pourront plus exercer d’autre mandat politique. Après les prochaines élections, une nouvelle génération de députés apparaîtra dans les différents parlements. C’est une bonne affaire. Le désespoir fait parfois naître les germes d’un plus bel avenir. Les scandales nous ont révéillés.

Ne passez-vous pas un peu rapidement au-dessus des difficultés de votre parti? Les sondages demeurent désastreux pour le PS.

Ils l’étaient aussi après les scandales à Charleroi, il y a plus de dix ans. Mais là aussi nous nous sommes réinventés et nous avons atteint un beau résultat aux élections suivantes. Reconquérir les coeurs des gens prendra du temps, mais mon parti est sur la bonne voie.

D’après les observateurs, le président Elio Di Rupo, quel que soit l’amour que lui porte la base du PS, est totalement inapte à incarner l’innovation du parti. Ne ferait-il pas mieux de passer le pouvoir à Paul Magnette dès maintenant ?

Heureusement, ce ne sont pas les observateurs qui décident du nom du président du PS. Grâce à Elio Di Rupo, notre congrès idéologique du mois dernier était un succès : le contenu aussi a été revu. Elio reste encore président jusqu’en 2019, et le côté positif c’est que les successeurs sont prêts à assurer l’avenir du PS. (rires) Le PS ne manque pas de princes héritiers.

Vous avez longtemps été citée comme successeur de Di Rupo. Regrettez-vous de n’être jamais devenue présidente de parti ?

Mon nom a souvent été cité, oui, mais je ne l’ai jamais envisagé sérieusement. Au cours de ma carrière, c’est la création de nouvelles choses qui m’a procuré le plus de satisfaction. Le Plan national cancer, le plan Rosetta pour aider les jeunes à trouver un premier emploi : voilà ce que j’aimais le plus. Et en tant que président de parti, on se trouve moins confronté à cet aspect de la politique. La présidence, c’est davantage une affaire de gestion quotidienne : il faut garder les égos en équilibre, distribuer les cartes. Cela me convient beaucoup moins. Je fais de mon mieux en tant que président de la fédération PS bruxelloise, mais diriger un parti c’est encore une autre paire de manches.

Vous ne croyez donc pas au rêve de Thierry Bodson, le Secrétaire général de la FGTB, de former un gouvernement wallon avec le PTB, si c’est mathématiquement possible?

C’est inutile d’encore en parler, non? C’est une chimère, ne serait-ce que parce que le PTB-PVDA exclut une participation au gouvernement.

En outre, le PS et le PVDA-PTB diffèrent très fort sur le plan du contenu. Le PS critique la politique européenne actuelle, mais cela ne signifie pas qu’il faut supprimer tous les traités européens avant même d’entamer les négociations du gouvernement.

N’oubliez pas non plus que le PVDA-PTB est un parti unitaire où Peter Mertens décide tout. Quand j’étais formatrice du gouvernement bruxellois, ce n’est pas Raoul Hedebouw qui s’est pointé. Et il ne le fera pas en Wallonie non plus. Il n’est que porte-parole national.

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