Bruno De Lille

« La Flandre est un failed state: des centaines d’enfants ne trouveront pas d’école néerlandophone à Bruxelles »

Bruno De Lille Député bruxellois pour Groen

La Flandre est un failed state. Quel autre nom donner à un état qui ne réussit pas à proposer suffisamment d’écoles et un bon enseignement à tous ses habitants ? Pourtant, il ne s’agit pas d’un produit de luxe, mais d’un dispositif de base de notre société.

La semaine dernière, le deuxième tour des inscriptions en maternelle et en primaire néerlandophones a commencé à Bruxelles. Or, on sait déjà que près de 2 000 élèves n’auront pas de place dans une école néerlandophone bruxelloise. Mais où doivent-ils aller? Dans une école francophone ? Ce n’est pas ce qu’ils souhaitent, et l’enseignement francophone souffre déjà d’un manque de places à de nombreux endroits. En pratique, ils restent souvent chez eux (pour les élèves de maternelle) où ils partent à Vilvorde, Meise, Alost, etc.

Le plus grand scandale, c’est que la Communauté flamande connaît ce problème depuis de nombreuses années. Il y a plus de quinze ans, il s’est avéré que Bruxelles faisait face à une croissance démographique importante et les administrations flamandes et bruxelloises ont compris que les écoles existantes ne pouvaient pas accueillir tous ces enfants supplémentaires. Au lieu de construire des écoles, la communauté flamande n’a agi qu’au compte-gouttes.

On s’est, pour ainsi dire, résigné à la pénurie, et on a gaspillé beaucoup de temps à déterminer qui avait accès à nos écoles. Entre-temps, on a fait porter le chapeau à l’enseignement francophone, car pour beaucoup de gens, c’est la mauvaise qualité de l’enseignement francophone qui surcharge « nos » écoles.

Pour la facilité, on a ignoré que la Constitution stipule que tout enfant qui souhaite suivre un enseignement néerlandophone en a le droit, quelle que soit la langue qu’il parle chez lui. Et on faisait semblant de ne pas voir que l’enseignement francophone n’était pas du tout en train de se vider, mais connaissait une croissance de la même ampleur.

La Flandre est un failed state: des centaines d’enfants ne trouveront pas d’école néerlandophone à Bruxelles

Le résultat? Chaque année scolaire, il y a des centaines d’enfants abandonnés à leur sort. Qui doivent rester chez eux au lieu d’aller en maternelle, alors qu’on sait à quel point ces premières années scolaires sont importantes, et particulièrement pour les enfants issus de milieux défavorisés. Qui a six ans, doivent parcourir des kilomètres pour se rendre à l’école éloignée de leur quartier, loin de leurs amis et connaissances.

En outre, il n’est absolument plus question de choix libre d’écoles à Bruxelles. Dans notre capitale, il n’est pas possible de choisir entre une école catholique et une école de la Communauté : on s’inscrit à l’école qui vous est attribuée et on est content d’avoir une école pour son enfant – quel que soit le projet pédagogique de l’école ou sa conviction.

C’est une question d’argent, mais aussi de sens des responsabilités. Les différents réseaux prennent des initiatives, mais elles se font lentement, et sont insuffisantes parce qu’elles sont surtout axées sur leur propre part/possibilités/moyens et ne sentent pas ou peu responsables de la pénurie.

À circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. Je demande donc que la Communauté flamande garantisse qu’il y ait suffisamment d’argent pour toutes les écoles nécessaires. Et si la ministre flamande de l’Enseignement Hilde Crevits (CD&V) se rend compte que les réseaux existants ne s’étendent pas assez vite, elle doit jouer le rôle de maître d’ouvrage afin qu’on ait comblé la pénurie d’ici deux ou trois ans. Prenez d’ailleurs aussi l’extension de l’enseignement secondaire en main, car selon les pronostics de l’administration de l’enseignement flamande, là aussi on aura une pénurie de quelques milliers de places d’ici 2019.

II est honteux que les néerlandophones de Bruxelles ne puissent garantir le droit à l’enseignement à tous les enfants. Dans ce dossier la Communauté flamande échoue sur tous les plans, et ne semble pas se rendre compte de l’urgence. On joue avec l’avenir de centaines d’enfants qui ne trouveront pas de place à nos écoles, et on risque de le payer très cher. Madame la ministre, je vous demande donc d’intervenir et d’agir maintenant !

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