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La Belgique est-elle prête à encaisser une nouvelle récession économique?

Dix ans après l’éclatement de la crise financière, sommes-nous prêts à encaisser une nouvelle récession ? L’accord estival du gouvernement Michel y contribuera-t-il ? La réponse à ces questions est tout sauf oui.

Pour la Commission européenne, dix ans après l’éclatement de la crise financière, le redressement économique en Europe est un fait : l’économie progresse et le chômage baisse. C’est une façon bien rose de présenter les choses, car la croissance est ténue et fragile, et le chômage est encore élevé dans certains pays et régions d’Europe, par exemple en Wallonie et à Bruxelles. Il faut également signaler que pour le moment l’économie est dopée par la politique de taux d’intérêt faible de la Banque centrale européenne (BCE). On fait tout pour garder les taux d’intérêt faibles et stimuler la croissance. L’économie tournerait-elle sans ce stimulus ?

La semaine dernière, le quotidien néerlandais NRC Handelsblad a demandé à Jean-Claude Trichet si nous étions suffisamment armés pour encaisser une nouvelle crise. Le Français était président de la BCE quand la crise du crédit a éclaté en 2007 et a joué un rôle essentiel dans le maintien du système bancaire. Selon lui, une crise conjoncturelle est « inévitable ». Cela fait partie du « cycle économique normal », dit-il et c’est le cas. Mais selon Trichet, beaucoup de pays européens possèdent très peu de munitions pour atténuer cette récession inévitable. Et il ne parle même pas d’une nouvelle crise de système. Celle-ci pourrait s’ajouter à la crise conjoncturelle et ébranler tout le système financier et économique, comme il y a dix ans. « Une nouvelle crise mondiale envenimera nos problèmes », déclare Trichet pour ceux qui ne l’auraient pas encore compris.

Jean-Claude Trichet trouve très problématique que les dettes aient augmenté dans le monde entier. C’est également le cas en Belgique : en 2007, notre taux d’endettement s’élevait à 87% du produit intérieur brut (bip), aujourd’hui, il est de 107%. Ces dix dernières années, notre taux d’endettement a fort augmenté à cause du sauvetage des banques et de la crise économico-financière. Cette hausse est présente dans toute la zone euro, mais le taux d’endettement y est de 90% en moyenne, un pourcentage beaucoup moins élevé que le nôtre. Si la BCE met fin à sa politique de taux d’intérêt faible et que l’intérêt remonte, les charges d’intérêts seront un lourd fardeau.

Grâce à la croissance économique, le taux d’endettement peut baisser: si le PIB remonte, la dette baisse par rapport au PIB. Aujourd’hui, l’économie progresse légèrement et fait donc un peu baisser notre taux d’endettement. Pour le diminuer encore davantage, on pourrait également vendre nos participations de l’État : les bénéfices pourraient diminuer notre dette. L’accord estival conclu par le gouvernement Michel promet uniquement la vente de Bellfius. On ne parle pas de liquider Proximus, par exemple. En outre, le gouvernement souhaite indemniser les coopérants Arco avec l’argent de la vente de Belfius et non diminuer la dette. Reste à voir si l’Europe sera d’accord.

Et évidemment, il y a encore moyen de faire des économies. Si nous voulons le faire sérieusement, il faut réfléchir au rôle de l’État. Quelles tâches doit-il accomplir ? Le gouvernement Michel n’a pas réfléchi à cette question. Pourtant, il diminue les dépenses publiques (ce que l’état dépense par rapport au PIB). Comparées à 2013, les dépenses publiques (sans compter les charges d’intérêt) baisseront de 2,3%, jusqu’un peu au-dessus des 50% du PIB. C’est quelque chose, mais cela ne suffit pas. Dans nos pays voisins, les dépenses publiques s’élèvent à 46,8% du PIB. Cela signifie une différence de 14 milliards d’euros. Et selon Marcia De Wachter, directeur de la Banque nationale de Belgique, une part des services publics dans l’économie de 42% est « réaliste et souhaitable pour la Belgique ».

La crise conjoncturelle n’a donc pas intérêt à arriver tout de suite, car si l’Europe n’est pas bien armée, la Belgique ne l’est pas du tout. Et on ne parle même pas d’une crise systémique.

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