Freud restera fidèle à sa loge jusqu'à sa mort. © Reporters

Freud « franc-maçon » ? La controverse gronde

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Sigmund Freud était membre du B’nai B’rith, association juive calquée sur les organisations maçonniques. On ne peut pour autant le qualifier de « franc-maçon », estiment des spécialistes.

Depuis sa sortie en 2012, le livre de Jean Fourton,  »Freud franc-maçon » (éd. Lucien Souny), suscite la controverse, en particulier dans les milieux maçonniques. La reprise, ces jours-ci, sur le site levif.be, d’un article du Vif/L’Express du 21 septembre 2012 consacré à cet ouvrage, a relancé le débat.

Nul ne conteste le fait que Sigmund Freud ait adhéré, en 1897, au B’nai B’rith, association juive calquée sur les organisations maçonniques. « Le pionnier de la psychanalyse est resté fidèle pendant plus de quarante ans à la loge  »Wien », qui dépend de cette association », précise Fourton, lui-même membre du B’nai B’rith (et du Grand Orient de France). La plupart des spécialistes contestent toutefois que le B’nai B’rith soit une organisation maçonnique, même si elle se structure en loges, reprend une partie du vocabulaire maçonnique et a un caractère humaniste.

« Aucun rapport avec la franc-maçonnerie »

« Je puis vous certifier que, contrairement à certaines idées reçues, le B’nai B’rith auquel Freud était affilié n’avait aucun rapport avec la franc-maçonnerie », nous écrit ainsi le Pr Jean-Philippe Schreiber (FNRS, ULB), co-auteur, avec Luc Nefontaine, d’un ouvrage intitulé  »Judaïsme et franc-maçonnerie. Histoire d’une fraternité » (paru chez Albin Michel en 2000). Schreiber précise : « B’nai B’rith était et est encore une société philanthropique non initiatique. Elle a ces deux seules particularités : d’abord d’avoir été assimilée à la maçonnerie par les anti-maçons et les antisémites ; ensuite d’avoir accueilli nombre de juifs allemands auxquels l’entrée en franc-maçonnerie était refusée parce que juifs, ou exclus de celle-ci pour le même motif. Freud n’a donc jamais été, jusqu’à preuve du contraire, franc-maçon, à la différence de Jung. »

« Ne pas oublier le contexte »

Jean Fourton, l’auteur du livre, réplique : « Ce point de vue fait l’économie du contexte dans lequel le B’nai B’rith a été fondé. Des juifs francs-maçons allemands, à New York, en avaient assez de l’antisémitisme régnant à l’époque dans les loges et voulaient fonder leur propre obédience. Laquelle accepterait des juifs exclusivement. Certes, le projet a évolué au fil des ans et, aujourd’hui, nombre de membres du B’B’ sont aussi membres d’autres obédiences maçonniques. Certains se reconnaissent francs-maçons du fait d’être au B’nai B’rith, d’autres pas. Mais tout le vocabulaire, les rituels, la tenue, l’initiation, les signes de reconnaissance, le mot loge… demeurent comme des empreintes du passé fondateur. Pendant de longues années, le B’B’ était invité et représenté parmi d’autres obédiences soeurs aux convents du Grand Orient de France que je fréquentais. »

Olivier Rogeau

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire